Saturday, December 23, 2006

Bons Baisers de Belgique

Je suis arrivée hier soir à l'aéroport de Zaventem (Bxl) où m'attendait maman depuis le matin. En effet, il y a eu quelques turbulences sur les vols Accra-Londres, Milan-Bxl. Premièrement, à Accra, ceux dont la destination finale British Airways était autre que London ont dû prendre Alitalia car les vols à partir de londres ont été annulés pour cause de brouillard dense.

La situation predeparture s'est résumée à attendre que le système d'Alitalia soit revenu en marche pour s'enregistrer et ensuite aller directement au contrôle de sécurité avant de pénétrer dans la zone duty-free (magasins Dufry) où j'ai acheté deux CDs Putumayo World Music. J'avais rendu le téléphone portable à Oxfam, donc je n'avais aucun moyen d'appeler les deux amis m'attendant à l'extérieur de l'aéroport (les accompagnateurs sont interdits d'entrée dans l'aéroport d'Accra) pour leur expliquer le problème.

J'ai rencontré durant l'attente et le voyage une Belge (Flamande), ingénieur civil qui travaille sur le site d'Elmina au dragage du lagon, une Française, Assistant Production Manager pour Savannah Fruits Company, basée à Tamale, ainsi qu'un agronome français en charge de projets liés à l'agriculture et au commerce.

Après quelques heures d'errance à l'aéroport de Milan (beau paysage), j'étais censée joindre Wendy (l'autre Belge) sur le vol du matin Milan-Bxl mais j'étais incapable de restituer le ticket donné par BA à Accra indispensable pour embarquer avec Alitalia: quelqu'un a dû omettre de me le rendre.

Après avoir vérifié que mon bagage avait pris la route aérienne pour Bxl, je suis allée au comptoir de la billetterie BA pour savoir ce qu'on me dirait. Ils m'ont mis sur le vol suivant d'Alitalia de 15.20. Dans la file, j'ai rencontré ce Sénégalais vivant près de Milan accompagnant son frère qui se préparait à prendre l'avion pour Londres et NY. Heureusement que nous avons commencé à parler. Il m'a bien aidée en m'achetant une carte de téléphone afin que j'avertisse maman et de quoi manger et boire.

Le reste du voyage s'est passé sans encombre. Seulement à l'arrivée à Zaventem, je n'ai pas récupéré ma valise. J'espère recevoir des nouvelles - positives - prochainement.

Maman m'a conduite à Tournai où j'ai revu marraine et parrain. A Taintignies, je suis allée chez papy et mamie avant de rentrer à la maison et de constater le repas familial du vendredi soir (rapporté de la friterie locale) et la finale de la Star Ac' à la TV (pauvre Dominique!).

Je me suis trempée dans un bain - rituel devenu rare en Afrique - jusqu'aux bouts de longs cheveux coiffés à l'africaine. Mon lit m'attendait soigneusement préparé depuis quelques jours. Une nuisette et un foulard offerts de Chine le couvrant: délicieuse attention.

Ce matin, j'ai téléphoné au service bagages de Bxl: pas encore de trace de ma valise. Dommage mais je ne perds pas espoir.

Cet après-midi, j'irai faire des courses avec maman. Je ne regrette pas de revenir à mes origines, habituelles et confortables (me rincer la bouche à l'eau du robinet ne me semblait pas naturel hier soir). Egalement plus faciles d'où provoquant déjà l'ennui.

Merci! Je viens de recevoir l'appel de l'aéroport qui envoie ma valise à la maison aujourd'hui :-)

Friday, December 15, 2006

The End of 11 Months in Ghana

11/12/2006

Ce que le Ghana m’a apporté ? D’abord, un peu plus de sérénité ; ensuite, j’ai regagné la Foi.

Depuis le premier soir où j’ai posé le pied sur le sol africain, j’ai vécu les craintes, les angoisses, les crises, la solitude, le dégoût, mais je ne regrette rien. Impossible d’exprimer à présent ces sentiments. J’ai dû oublier plus de la moitié des mauvais moments pour ne retenir que les meilleurs. Ce qu’on appelle résilience.

Aujourd’hui – Caro m’avait prévenue –, je me connais mieux. Mais aussi, je crois pouvoir donner un sens et une certaine logique à ma vie. This ‘life-changing experience’ – pas simple à relever le défi et maintenir le cap (j’ai voulu plus d’une fois retourner à la maison – a révélé la personnalité, forte et sensible à la fois – que je suis fière d’assumer.

Je considère le bilan à la fin de 2006 comme une bénédiction. Je suis sûre que je continuerai d’apprendre en 2007. J’accepte plus positivement qu’on ne peut pas tout connaître de la vastitude du monde. Je mesure mieux la valeur de partenariat. J’estime que ce qui compte est de ne pas tout (vouloir) entreprendre mais d’agir de son mieux dans chaque démarche selon son éthique. Ne pas toujours désirer ce que l’on n’a pas mais apprécier ce que l’on a déjà (acquis). Etre conscient de ses aptitudes et persévérer à les utiliser et développer. Penser à prendre du plaisir à tout ce qu’on fait, fournir le maximum.

J’ai quelques pensées à adresser :

- Le train de la vie me fait rencontrer une variété de gens m’inspirant chacun le souffle contribuant à mon amour de l’humanité.
- En particulier, ceux et celles qui m’apportent des vues contrastantes m’intéressent, me fascinent.- Le « choc culturel/cultural shock » dont on parle souvent, chez moi, se nommerait plus adéquatement « déclic émotionnel » : l’Afrique crée la chance de m’ouvrir l’étendue des connaissances (personnelles, sociales, professionnelles) ; l’Europe est là pour me rappeler mon identité et les gens dont je semble rester le plus attachée au bout du compte.

Not the End of the Story


Comment envisage-je l’année prochaine ? Réponse honnête : au Ghana. Pourquoi, me demanderez-vous ? Parce que d’abord je m’y sens bien, épanouie, plus naturelle. Je trouve que le Ghana – et l’Afrique, par extension – a encore beaucoup à m’offrir. Peut-être même que j’ai moi-même à offrir – j’espère.

Je m’autocensure un peu parce que j’ai écrit ce texte dans l’atmosphère détendue de la maison, alors que maintenant la pudeur et une part de superstition me freinent de tout publier.

Pour terminer sur ces paroles d’une chanson d’Edith Piaf : « Non rien de rien, non je ne regrette rien. Ni le bien, ni le mal qu’on m’a fait tout ça m’est bien égal. »

Thursday, December 14, 2006

Kokrobite Last Weekend

I seized the opportunity to visit once this year Kokrobite Beach Resort. This is not far from Accra, but there is traffic on the road towards Cape Coast.

I recommend the place: animated at night and relaxing in the day.

The pictures come from the blog http://www.manuelm.org/ghana/.

Krokobite at Night


Credit: Manuel Moeller

Krokobite Beach


Credit: Manuel Moeller

Tuesday, December 05, 2006

Bien dit

« Toute nation qui, par des tarifs douaniers protecteurs et des restrictions sur la navigation, a élevé sa puissance manufacturière et navale à un degré de développement tel qu’aucune autre nation n’est en mesure de soutenir une concurrence libre avec elle ne peut rien faire de plus judicieux que de larguer ces échelles qui ont fait sa grandeur, de prêcher aux autres nations les bénéfices du libre-échange, et de déclarer sur le ton d’un pénitent qu’elle s’était jusqu’alors fourvoyée dans les chemins de l’erreur et qu’elle a maintenant pour la première fois, réussi à découvrir la vérité. »

Friedrich List, économiste, 1840 (cité par Le Monde diplomatique du mois de décembre 2005)

Des médicaments comme pouvoir économique

Les entreprises commerciales sont prêtes à tout pour accroître leurs chiffres d’affaires ! Les moyens non-éthiques incluent de faire pression sur les gouvernements des pays pauvres, y compris en matière de santé. La voie royale consiste à conclure avec eux des accords bilatéraux et régionaux de libre-échange.

Le terme ‘libre’ dans ce contexte, de même que dans l’expression ‘libre marché’, perd son sens en réalité. Pour preuve les mesures de protection (tarifs et quotas à l’importation, subsides…) appliquées par les pays riches, particulièrement les USA et l’UE. La pratique deux poids deux mesures implique que ceux qui érigent des barrières protectrices exigent des autres qu’ils libéralisent.

Par exemple, les USA tentent d’imposer des règles « ADPIC plus » dans tous leurs accords conclus avec d’autres pays, par exemple la Colombie, le Pérou et la Thaïlande. C’est-à-dire qu’ils veulent dépasser l’Accord de l’OMC sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce. Or, Geoff Tansey, écrivain britannique et expert conseil sur les questions alimentaires et les droits de propriété intellectuelle, soulignait en 2001 que 'plusieurs pays en développement n'accepteront pas sans réticence certains aspects de l'accord en vigueur, créé essentiellement par les pays industrialisés'. (http://www.idrc.ca/fr/ev-5409-201-1-DO_TOPIC.html)

De même, les Accords de Partenariat Economique (APE), que l’UE et les pays de l’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique sont en train de négocier, contiennent des dispositions appelées « OMC plus ». Sous prétexte de rendre les accords compatibles avec les règles de l’OMC, « l’UE veut que les négociations sur les secteurs liés au commerce aillent au-delà des engagements pris devant l'OMC » (http://agritrade.cta.int/fr/content/view/full/2493). Les organisations paysannes du Burkina Faso, notamment, craignent pour la sécurité agricole et revendiquent la souveraineté alimentaire (http://www.abcburkina.net/souv_aliment/index.htm). Voir aussi la publication de décembre du Monde Diplomatique, notamment l'article 'Plutôt que le protectionnisme, la souveraineté alimentaire' : http://www.monde-diplomatique.fr/2005/12/BERTHELOT/13036.

Bien sûr, les pays en voie de développement (PVD) manquent des capacités pour négocier efficacement à l’OMC. Toutefois, Dipak Patel, Ministre zambien du Commerce et de l’Industrie et Président du Groupe des Pays Moins Avancés de l’OMC, met en garde : « S’en aller et détruire l’OMC ne serait pas dans notre intérêt, parce qu’alors les pays vont entrer dans des accords bilatéraux et notre capacité et autorité de négociation et pouvoir sur une base bilatérale est extrêmement faible, politiquement et économiquement. Nous devons nous engager dans l’OMC… mais pas à n’importe quel prix. » (‘I’m staying at the table… for now’ in developments, Numéro 33, premier trimestre 2006, p. 27).

L’économiste et prix Nobel américain Joseph Stiglitz s’est entretenu avec l’Humanité à la sortie de son livre ‘Un autre monde. Contre le fanatisme du marché’ (2006) : « S’ils reconnaissent, depuis les négociations de l’OMC en 2001 à Doha, que les cycles commerciaux précédents ont nui au développement, les cycles suivants ont toutefois été des échecs. Le commerce international doit changer d’orientation car il est injuste et ne fonctionne pas. » (http://www.humanite.presse.fr/journal/2006-09-22/2006-09-22-837151)

Marchander la santé

Car depuis l'échec du round des négociations de Doha, les pays riches semblent friands d'accords bi- ou plurilatéraux en dehors de la structure multilatérale. En ce qui concerne l’état mondial de la santé publique post-Doha, le rapport d’Oxfam ‘Des brevets contre des patients: Cinq ans après la Déclaration de Doha’ éclaire la situation de l’accès aux médicaments dans les PVD : Il y a cinq ans, les membres de l’OMC signaient un accord ministériel visant à faire en sorte que les règles relatives à la propriété intellectuelle n’entravent plus les efforts des pays en développement en matière de protection de la santé publique. Depuis, cependant, peu de choses ont changé. Le prix des médicaments brevetés reste inabordable pour les populations des pays les plus pauvres. Les règles commerciales entravent toujours considérablement l’accès aux versions moins coûteuses des médicaments brevetés (les médicaments génériques).’
(http://www.oxfam.org/fr/policy/briefingpapers/bp95_patentsvspatients_061114).

Le capitalisme se pratique, dans de nombreux cas, comme une course effrénée entre le plus rapide et le plus lent. Compétition inégale selon Tansey puisque « C'est comme si le Manchester United [fameux club de soccer britannique] jouaient contre une équipe qui compte quelques bons joueurs et d'autres qui n'ont jamais mis les pieds sur un terrain de soccer. ».

Ceux qui sont aux commandes nourrissent des intérêts – pas mêmes patriotiques mais – égoïstes et lucratifs, et se moquent de l’interdépendance dans les enjeux mondiaux (y compris environnementaux). Ils agissent comme un rempart au progrès général en s’alimentant de résultats volatiles, à court-terme, menaçant la durabilité des opérations dans des domaines variés.

Stiglitz réprouve telle attitude et rectifie : « (…) [P]our qu’une discipline soit bonne, elle doit s’inquiéter de la croissance à long terme et non de ceux qui ne pensent qu’aux vingt-quatre prochaines heures. C’est en fait une critique de la libéralisation des marchés financiers. »

Souvenir from the Office

Sunday, December 03, 2006

Improvised Television

La vue par la fenètre de la cuisine de mon studio à Dzorwulu (Accra) plonge sur la cour de la maison voisine. Depuis des mois, je suis spectatrice des mouvements qui s'exécutent sous mon regard, presqu' indiscret si ce n'est que les scènes que j'observe ne sont ni obscènes ni dégradantes mais m'inspirent et me réconfortent.

Tous les personnages dans cette fenètre-réalité ont l'air de respirer la gaieté. J'interprète leur quotidien - départ au travail/à l'école, tâches régulières et relaxation périodique - comme signes de bien-être. Cette foyer ordinaire africain - selon les dires, de l'ambassadeur du Mali - incorpore un nombre élevé de membres - parents, enfants, aides, chiens - restant apparemment la plupart du temps à l'intérieur du 'compund'. Je me suis mise à regretter de ne pas appartenir à une famille synérgique comme celle-là, à imaginer que si ma famille avait vécu en autarcie, les choses auraient été tout autres.

Cependant, 'I am who/what I am': je ne regrette pas d'être devenue celle que je suis en raison du contexte et des circonstances, l'inné et l'acquis interagissant dans la formation de l'Etre, ainsi de l'être humain.

Celle qui aujourd'hui s'enthousiasme de scènes banales ou s'indigne d'injustices dues au système provient du 'Vieux Monde', avec ses technologies et services à bas prix, qui toutefois ne peut offrir aux nouvelles générations la sécurité - subjective ou réelle - dont elles ont besoin, provoquant chez un grand nombre, pas seulement de jeunes, un malaise au sein d'une société inaccueillante, flanquée de préjugés entretenant les inégalités.

Je connais personnellement des exclus ayant développé des troubles profonds au point de devenir incapables de se noyer dans la masse et d'adopter des rituels accomplis et des symboles adorés tels que travail(ler) et consommation. Le reste est au mieux négligé, au pire diabolisé. J'espère que j'exagère en décrivant ainsi la situation.

Qu'en pensent ceux qui vivent actuellement dans des sociétés où la misère des autres n'est qu'une façon de relativiser ses problèmes voire de les oublier un instant, où l'intérêt de son prochain se limite à celui de sa famille et ses amis ou parce qu'il y contribue???